PDJ avec Cyril CHICHE - Co-fondateur et CEO de Lydia Solutions

Cyril Chiche, cofondateur et CEO de Lydia et VP de France FinTech

Écrit par Marine Delcros, 26 octobre 2021

Monde des grandes écoles et universités LE JOURNAL • N°95 • OCTOBRE 2021

interview Cyril Chiche Lydia
Cyril Chiche. ©Lydia


Co-fondateur et CEO de l’appli de paiement mobile Lydia, Cyril Chiche baigne dans l’entrepreneuriat depuis près de 20 ans. Une appétence comme héritage familial qui l’a amené à lancer Lydia, une des pépites de la fintech française, en 2013. Ça tombe bien puisqu’il est également VP de FinTech France. Rencontre.

« Je te fais un Lydia ? » Vous avez forcément déjà prononcé ou entendu cette phrase, surtout si vous avez entre 18 et 35 ans ! Plus qu’une marque, Lydia est devenu un nom commun. Huit ans après son lancement, la startup qui souhaite « réhumaniser la banque » a fêté en juillet dernier ses 5 millions d’utilisateurs et a levé 112 millions d’euros en décembre 2020, un record pour une startup de la fintech. Cyril Chiche nous raconte les dessous de son histoire. Attention, parcours à suivre !

Parlez-nous de vos débuts dans l’entrepreneuriat.

Cyril Chiche Lydia
Antoine Porte et Cyril Chiche. ©Lydia


Durant mes études à l’ISG, je  souhaitais débuter dans le marketing chez un grand nom du luxe ou de la mode. J’ai donc cherché un stage de 3e année en marketing à l’international, mais on ne me proposait que des stages non rémunérés ce que je trouvais extrêmement choquant. J’ai finalement choisi un autre chemin en entrant chez Neartek, une entreprise dans l’informatique qui débutait et cherchait des commerciaux. Après avoir cofondé des entreprises, j’ai eu envie de m’orienter vers le BtoC. Par hasard, je me suis intéressé au paiement mobile : il explosait au Kenya (où peu de gens étaient bancarisés), au Japon et en Corée, où tout le monde était déjà équipé d’un smartphone. Sans doute par naïveté et par manque de connaissance de la complexité du sujet, je me suis lancé là-dedans : j’ai exploré les possibilités et cherché un cofondateur. J’ai alors rencontré Antoine Porte avec qui j’ai travaillé tous les aspects financiers, faisabilité… et, en septembre 2011, nous nous sommes lancés.

Qu’est-ce qui vous plait dans l’entrepreneuriat ?

Dans ma famille, on ne compte que des d’entrepreneurs ou des professionnels indépendants : alors c’est dans mes gènes ! J’ai débuté ma vie professionnelle dans des startups et j’ai de suite aimé la capacité d’impact que cela me procurait. Même en tant que stagiaire, l’impact de mes actions était beaucoup plus fort que dans d’immenses structures. C’est ce qui m’excite et m’intéresse.

Vous avez levé 112 millions € avec Lydia en décembre dernier. Racontez-nous l’histoire de cette success story.

Nous avons débuté par un service de paiement par QR code dans les bars en 2012. On a appris des tonnes de choses et sur ces bases, nous avons défini la philosophie de Lydia et notre vision à long terme : un système de paiement mobile pour tous les achats du quotidien. Nous nous sommes d’abord tournés vers une application pour les pros et indépendants afin qu’ils puissent encaisser sans machine à carte et pour les particuliers pour pouvoir se rembourser, partager les additions, etc. Nous avons développé l’appli jusqu’en juillet 2013 puis avons lancé Lydia. Nous nous sommes faits jeter par les taxis, les médecins, les ostéopathes, les plombiers… Une dizaine de métiers et à chaque fois c’était la débâcle ! Nous commencions à stresser car nous nous étions lancés avec 600 000 € en poche, l’argent de nos proches…

Le tournant ?

Un jour, un membre de notre équipe nous a proposé d’aller vers son école de développeurs pour voir si la partie peer to peer pouvait les intéresser. Nous avons rencontré le trésorier du BDE qui a voulu utiliser Lydia pour encaisser les ventes des places pour les soirées. Une évidence ! Tout le campus s’est équipé et les étudiants ont même forcé la cafétéria à utiliser Lydia. Nous nous sommes développés sur 10 campus, puis 50. Aujourd’hui nous sommes sur 450 campus.

Les étudiants ont joué un rôle dans le développement de Lydia. Est-ce toujours le cas ?

On peut même dire que ce sont les étudiants qui ont fait Lydia. Fin 2015, j’ai su qu’on tenait un truc : j’étais invité à intervenir dans un cours à Dauphine et dans le hall, j’ai entendu un étudiant dire à un autre : « Je te fais un Lydia ». Cela arrive qu’une marque devienne un nom commun mais pas une marque de cette taille, avec 15 collaborateurs et 60 000 clients… On avait répondu à un besoin et on tenait quelque chose de viral et potentiellement sociétal.

Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Cyril Chiche Lydia
©Lydia


Nous avons fêté nos 5 millions d’utilisateurs le 15 juillet 2021 et gagnons environ 150 000 nouveaux utilisateurs par mois. Aujourd’hui 80 % de notre base a entre 18 et 35 ans mais le segment qui grossit le plus est celui des 35-45 ans. Notre but ? Réinventer la banque et développer tous les produits qui y sont proposés. Après le paiement entre particuliers et le paiement grâce à une carte physique, nous allons étendre nos services au crédit et comptes épargne.

Vous êtes vice-président France Fintech. Pouvez-vous nous en parler ?

France FinTech est une association réunissant des startups de la fintech française. Son but : en faire la promotion, mais aussi dynamiser les échanges à l’intérieur de l’écosystème (sur des bonnes pratiques ou sujets sur lesquels on peut mettre des moyens en commun) et de faire le lien entre l’écosystème et les systèmes financiers (banques assurances, régulateurs, ministères, etc). Nous avons débuté il y a 5 ans avec une dizaine d’entreprises et aujourd’hui, nous sommes plus de 200. L’écosystème s’est développé de manière extraordinaire.

Pourquoi ?

D’abord grâce à une politique volontariste mise en place par les trois derniers gouvernements successifs, avec une forte accélération sur le quinquennat actuel. Il y a également eu une vraie prise de conscience du besoin pour la France d’avoir un écosystème dans le numérique avec des startups fortes. Il y a tout un tas d’aides et d’incitations pour les investisseurs et cela a beaucoup d’effets. Aujourd’hui beaucoup de jeunes veulent travailler dans des startups. Cela est aussi dû à la réussite de certaines startups tech comme BlaBlacar, Critéo.

La fintech est le secteur qui lève le plus d’argent, plusieurs milliards par an en France et qui crée beaucoup  emplois. Nous, nous allons recruter 200 personnes dans les 12 prochains mois grâce aux financements. Et nous ne sommes pas les seuls !

La France a donc tout pour être la reine de la tech ?

C’est un secteur qui devient très fort en termes de création d’emplois. En France, nous sommes reconnus pour nos compétences en mathématiques, en sciences fondamentales mais jusqu’à présent l’écosystème n’était pas assez développé et les cerveaux partaient. Aujourd’hui c’est l’inverse : beaucoup d’étrangers aux parcours spectaculaires viennent du monde entier pour travailler dans les entreprises françaises.

Le prochain challenge pour les startups ?

Il y a sans cesse des challenges car c’est un environnement qui va très vite. Ce n’est pas parce qu’on a trouvé une idée que cela va fonctionner pour toujours. Il faut en permanence trouver des solutions optimales à des problèmes donnés.  Aujourd’hui, on attend aussi beaucoup des startups qu’elles aient un engagement sociétal : une attente légitime des jeunes générations.


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